La maladie mentale jusqu'au Moyen âge

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Bonjour tout le monde. J'imagine que la thématique ne va pas concerner tout le monde. Je suis actuellement en formation à la faculté de théologie Jean Calvin à Aix en Provence et j'ai eu l'occasion de réaliser un devoir sur la maladie mentale comme élément de culture. L'objectif a été de développer un regard apologétique sur la maladie mentale au fur et à mesure de ses différentes représentations au cours de l'histoire. Il m'a semblé intéressant de pouvoir vous proposer les quelques réflexions que j'ai pu avoir dans la réalisation de ce devoir. L'histoire est un élément incontournable dans notre compréhension des choses et dans la manière dont elles se sont construites. La maladie mentale ne fait pas exception à la règle.

Même si aujourd’hui nous cherchons à formaliser la question de la maladie, les problématiques psychiques ont été à part notamment par les difficultés que l’être humain a eu de pouvoir l’analyser. C’est toujours le cas aujourd’hui. Même si nous parvenons à comprendre certaines parties des mécanismes de la maladie mentale, il n’en demeure pas moins de nombreux mystères.

Si nous prenons une définition simple de la maladie, nous pourrions prendre celle-ci: Altération, trouble de l’organisme. N’appréhendons pas, dans notre vision du monde, le péché comme une sorte de maladie, mais comme étant la source initiale de l’apparition des altérations et des troubles de l’organisme.

De l’antiquité jusqu’au Moyen âge

Ce que disait le monde séculier sur la maladie mentale:

Hippocrate disait ceci de la mélancolie, que nous appelons davantage « dépression » aujourd’hui:

« Si tristesse et crainte durent longtemps, un tel état est mélancolique. »¹(#ftn1)

Hippocrate a voulu structurer la médecine. Avec son disciple Galien, ils ont travaillé et promu la théorie des humeurs. Cette théorie a fait office d’autorité pendant presque un millénaire. Elle visait, à partir d’une tradition pagano-romaine, la structuration des états émotionnels d’un individu selon le monde matériel (feu, terre, eau, air). Lorsqu’il y avait un déséquilibre, il fallait expulser certains liquides pour soigner la personne. Ces liquides étaient au nombre de quatre: sang, phlegme, bile jaune et bile noire.

Bien que le Moyen âge a marqué de profonds changements dans l’entremêlement avec la religion, la théorie séculière qui faisait office d’autorité était toujours celle des humeurs. Les soins des troubles mentaux étaient donc essentiellement effectués par l’expulsion de liquide par des orifices, ou non: provoquer des diarrhées ou des vomissements, faire transpirer ou encore effectuer des saignées.

C’est également durant le Moyen Âge que nous voyons l’apparition de structures sociétales dans lesquelles nous enfermons les « fous ». Ils sont retirés de la société, car les considérant comme non conformes aux normes sociétales.

Ce que disait le monde religieux sur la maladie mentale

Dans le monde grec, la maladie mentale était soit d’ordre physique, comme nous l’avons évoqué plus haut, soit d’ordre spirituel. Mais dans ce cas, il y avait souvent l’idée de violenter la personne pour qu’elle redevienne saine avec exorcisme, restriction, torture, lapidation que nous retrouverons également dans le Moyen âge.

Dans le monde juif, il y avait bien sûr l’exemple de Nabukadnetsar et de Saül où la folie était provoquée par Dieu. Nous reprendrons cela plus tard.

C’est au Moyen Âge, lorsque l’Église a commencé à se structurer et notamment au travers de l’église catholique, que la religion, en Europe, prend une large part dans la considération des maladies mentales:

La folie, prisonnière des griffes de Satan, sera traquée, pourchassée comme d’autres formes d’hérésies […] le corps est le lieu du mal; méprisé, martyrisé, réceptacle des désirs impurs, exutoire par où s’épanchent les tendances perverses.[[2]](#_ftn2)

La maladie mentale est considérée comme une punition de Dieu ou la possession démoniaque. Il y a donc pratique de l’exorcisme, par la prière et d’autres traitements repris de l’antiquité: purger et maltraiter le corps.

Les points de contact et de contraste avec une vision biblique du monde

Il y a plusieurs réflexions intéressantes :

– D’une part, la question de l’anthropologie. Durant les différentes époques, il y a la considération « anormale » de la maladie mentale et d’un état à rétablir. Dès la chute, l’ensemble de la création a été corrompu et notamment l’être humain dans son corps et son cœur. Il ne devrait pas être étonnant que le dérèglement des deux crée des altérations de notre fonctionnement: notre cerveau est corrompu et par extension l’ensemble de nos fonctions cognitives. Les scientifiques et religieux ont donc tenté d’expulser ce mal pour restaurer la nature humaine.

C’est louable, mais malheureusement vain: la problématique du péché se situe dans le cœur de l’être humain. Seul Dieu peut restaurer cette nature au travers de la régénération et de la foi en Christ, personne d’autre.

– D’autre part, il y a la question de la spiritualisation des maladies mentales. À l’époque, ils n’avaient pas d’outil statistique ou d’IRM fonctionnel. Les êtres humains tentaient d’expliquer d’une manière pragmatique selon les connaissances de l’époque … qui étaient très limitées. Il y avait des conseils de bons sens comme l’hygiène de vie ou l’alimentation. De même, nous connaissons les bienfaits de certaines pratiques comme les bains chauds ou le hammam.

Les exemples comme Nebukadnetsar ou Saül pourraient nous montrer le lien spirituel de la maladie. Il existe, car Dieu est souverain et agissant sur le monde. Mais dans la Bible, nous observons des symptômes de maladies mentales liés au péché et à la corruptibilité du corps.

Il suffit de considérer tous les exemples de dépression, considérée comme une maladie mentale. Il y a un nombre de chapitres important qui y est consacré. Nous pouvons le voir dans les Psaumes de David, le récit de Job, 1 Rois 19 avec la détresse d’Elie… la Bible n’est pas avare quand Dieu veut nous montrer la faiblesse psychique humaine et le besoin d’avoir un Dieu souverain qui nous soutient dans sa grâce.

Vous pourrez retrouver ici quelques pistes de réflexions si vous souhaitez devenir psychologue chrétien.

Vous pourrez trouver ici les raisons de ma présence sur TPSG.


1. 23ᵉ aphorisme du livre VI des Aphorismes d’Hippocrate.
2. E. PEWZNER, Le fou, l’aliéné, le patient, op. cit., p42.

Samuel Laurent

Chrétien et psychologue, Samuel est marié à Pauline depuis 17 ans et ont trois enfants. Ils ont créé l’association « La Boussole » avec laquelle ils proposent des formations en accompagnement biblique à l’intention des églises locales. Il est étudiant à la Faculté de Théologie Jean Calvin.

La question de l’accompagnement/counseling biblique est la principale raison de leur présence sur TPSG. ils souhaitent développer et partager leur vision biblique du monde autour de l’accompagnement, de la psychologie et des problématiques du cœur humain.

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Orateurs

F. Varak et V. Rébeillé-Borgella